Ce matin je suis gonflé d’énergies
positives alors j’en profite pour m’essayer à cette écriture
qui me fuit de plus en plus, pas celle qui en permanence s’épanouit
ou se déroute dans ma ciboulotte mais
celle qui s’accouche en clavier et peut se partager. Energies
positives? La faute aux 70 ans de Janine qui se fêtaient hier en
château
barjot de Valcivières.
Les anniversaires ont bien des rites
et des codes. J’étais content d’y participer mais, la veille, ma
tentative d’en ébaucher une petite parodie avait débouché sur
une forte accélération des méninges qui ne s’éteignit pas et me
valut nuit blanche, décomposant mes vers et mes horaires. Pourtant
de bien plus forts émois devaient en samedi venir
émousser mes fatigues et mes phobies de foule et m’embaumer d’une
douce béatitude.
Bien sûr, il y eut d’abord en
midi le pique-nique des exilés arrivant de loin, la plupart vétérans
des années héroïques où de toute la France surgissaient hippies
et marginaux soixante-huitards attirés par nature et paysages et par
le faible coût de maisons à louer ou à acheter en Forez et
Livradois. L’ambiance était aux retrouvailles et aux souvenirs
qu’en pièce tardivement rapportée dans ce cercle je ne pouvais
que contempler.
Puis, profitant de ce que les orages
augurés jouaient encore à cache-cache alentour, commença le
débarquement rythmé des contemporains, en solo, en couples, en
familles, des enfants, des ados, des adultes, des anciens, des natifs
et des immigrés, avec plats, cadeaux, petits mots, jeux, fleurs,
francs sourires et joyeux délires. Comme j’acquiers peu à peu
quelque mémoire de têtes et de noms, j’alternais ou je me
baguenaudais plaisamment, goûtant l’heure et les rencontres.
Ensuite, la pluie nous concentrant
sous les couverts, je me surpris à ne point ressentir cette
oppression qui couramment me gagne au sein des affluences. Bien au
contraire. Je m’imprégnais, j’entrais en ravissement. Pour sûr
c’était l’anniversaire de Janine qui nous rassemblait ici. Et
personne n’aurait voulu manquer cette occasion de lui témoigner
l’attachement, l’amitié, la reconnaissance. Mais c’était plus
aussi. C’était comme une communauté qui se célébrait elle-même
à travers Janine qui en est âme, lien, confessionnal. Oui, c´’était
beaucoup plus que la fête de Janine, c’était celle de Janine et
Léon car ils sont complémentaires et indissociables dans cette
animation des entraides, des envies et des liesses. C’était la
fête de tous ceux qui forgent cette culture de la solidarité, de la
qualité de vie dans le goût du local et l’ouverture à la
diversité, au delà des avoirs, des titres et des pouvoirs, en
réjouissance d’être et faire ensemble, sans exclure ni
s’enfermer. C’était la fête de cette nouvelle auvergnitude qui
s’esquisse et se complaît dans bien des hameaux et villages de
l’Ambert et autres endroits.
C’est ce qui me grisait de plus en
plus sous ce chapiteau devenu pressoir de rêves. C’était la plus
belle démonstration que je ne m’étais pas trompé en choisissant
Les Fayes pour dernier refuge car si ses charmes de nature et
d’ouvrages paysans m’avaient envoûté je savais aussi y
trouver des voisinages selon mon coeur, l’expérience
m’ayant déjà
appris que le lieu le plus magique peut devenir cauchemar s’il
est encerclé par des nuisibles.
Alors, pardon Janine, je ne me suis
pas empressé dans les salles grouillantes où démarrait ta
cérémonie d’années. J’ai préféré
l’auvent déserté afin de mieux savourer
mon émotion et accueillir
un nom pour ce moment de festivité : la Janivières. Jani
évidemment car si tout ceci est de tous, tu en es
le symbole. Et Vières pour ce Valci qui héberge une belle
concentration d’adeptes du beau et chaud vivre ensemble et
en est donc un autre symbole.
A quand la prochaine Janivières?
Car si mieux vaut seul que mal entouré, même pour un ermite il est
encore plus merveilleux d’être seul et se savoir bien entouré.
Les Fayes de Valcivières, le
dimanche 29 mai 2016
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